IBM a pratiquement tout inventé dans le monde des disques durs. Son premier fleuron, qu’il doit à Reynold Johnson, a été le premier en 1955 d’une longue, très longue série, qui va du 350 aux modèles Winchester en passant par les "floppy discs". Une saga particulièrement glorieuse...
Il faut se remettre dans le contexte des années 50.
Les premiers ordinateurs venaient à peine d’apparaître et l’on se posait déjà des questions sur la manière de les programmer et de stocker les informations à traiter.
Pour le stockage, on ne disposait que de dérouleurs de bandes magnétiques à accès séquentiel, ce qui "a priori" interdisait tout espoir de traiter des données autrement que très lentement.
IBM était à l’époque en pleine expansion et marquait son temps par une créativité, certes à vocation financière, pas toujours respectueuse des "bonnes mœurs", mais qui a profondément influencé et conduit la vie de ce que l’on commençait à appeler le TI.
IBM utilisait des bandes ½ pouce de large, 2400 pieds de long (732 mètres) et de 556 ou 800 dpi de densité longitudinale (le long des pistes).
Mais ces bandes avaient un inconvénient majeur, celui de devoir les dérouler pour accéder à une information. Avec un temps d’accès qui se comptait en secondes, ce qui était incompatible avec des traitements qui n’auraient pas été séquentiels.
De sorte qu’IBM a cherché autre chose et a confié à Reynold Johnson, un ancien professeur, créateur dans l’âme, le soin d’imaginer avec une équipe dédiée, un périphérique de stockage, capable d’enregistrer les données, mais surtout de les restituer en un temps qui se compterait en millisecondes et non plus en secondes.
Il faudra 3 ans de travaux à Johnson dans son laboratoire de San José, pour aboutir à ce qu’IBM appellera l’unité à disque 350.
Ce périphérique, évidemment très limité si on le considère avec nos critères d’aujourd’hui, avait une capacité de 5 Mo, dont 3,75 Mo seulement étaient disponibles pour les données proprement dites.
En termes d’encombrement, le disque de Johnson était quelque peu exigeant, avec près de 2 m de hauteur et un poids dépassant la tonne.
Mais le "ver était dans le fruit" et plus jamais l’industrie du stockage ne remettra en cause l’accès aux données de manière aléatoire, avec des temps d’accès qui iront toujours en diminuant.
L’IBM 350 affichait des temps d’accès de 600 ms, ce qui aurait été incompatible avec les futures applications transactionnelles, mais suffisant pour prouver le concept.
On remarquera d’ailleurs que Reynold Johnson aura été obligé de tout inventer, puisqu’il n’existait pratiquement aucune technologie, susceptible de servir de point de départ à son projet.
Hormis l’enrobage du support avec une couche magnétisable, qui existait déjà pour les bandes magnétiques. Il créera ainsi la technique de déplacement des têtes de lecture/écriture sur un coussin d’air et concevra des têtes capables de détecter dans un temps très court le sens des champs magnétiques portés par les supports.
L’unité IBM 350 comportait 50 disques de 24 pouces, soit un peu plus de 60 cm, pour un total utile de 100 faces, le substrat magnétique étant de l’oxyde de fer, un domaine où l’on accomplira de très gros progrès par la suite. Chacun des disques étaient dotés de 100 pistes, les 2 têtes de lecture ayant été conçues en fonction de l’espace inter-piste, de manière à éviter les interférences magnétiques, mais surtout se déplaçant verticalement pour se positionner sur la bonne surface, puis horizontalement pour survoler la bonne piste. Ce double déplacement a depuis été abandonné.
Quant à la vitesse de rotation, elle n’était que de 1 200 TPM, soit le tiers de ce qui se fait actuellement sur les disques modernes, vitesse réduite qui explique en partie le débit encore très faible de 8,8 Kcaractères par seconde.
In fine, l’IBM 350 aura été le premier modèle d’une technologie des disques durs qui existe toujours, même si elle est concurrencée par des SSD, du "tout mémoire". Dans ce domaine, IBM aura quasiment tout inventé. Ce n’est plus tout à fait le cas aujourd’hui…